
Gagner un procès pour moins de 100 000 $ au Canada peut en réalité vous coûter bien plus cher que de trouver un arrangement.
- Le coût réel d’un procès inclut votre temps, le stress et les opportunités d’affaires perdues, dépassant souvent la somme en jeu.
- La clé n’est pas de prouver que vous avez raison (votre position), mais de comprendre ce dont vous avez réellement besoin pour avancer (votre intérêt).
Recommandation : Évaluez chaque conflit non pas en termes de « droit », mais en termes de « rentabilité » pour votre entreprise. La voie la plus rapide vers une résolution acceptable est presque toujours la plus profitable.
Vous avez un client qui ne paie pas, un fournisseur qui n’a pas livré la marchandise convenue. Votre première réaction, tout à fait humaine, est la colère. Votre réflexe est de vouloir « faire valoir vos droits », de « le poursuivre en justice » et de « gagner ». Vous contactez un avocat, qui vous confirme que vous avez un « bon dossier ». La machine est lancée. Pourtant, croyez-en mon expérience de médiateur, c’est précisément à ce moment que de nombreux entrepreneurs commettent leur plus grave erreur stratégique. Ils posent la mauvaise question. La véritable question n’est pas : « Ai-je une chance de gagner ? », mais plutôt : « Combien ce combat va-t-il réellement coûter à mon entreprise, même si je gagne ? ».
Le système judiciaire a sa place, mais pour les litiges commerciaux impliquant des PME, il s’apparente souvent à utiliser un marteau-pilon pour écraser une noix. Les solutions alternatives comme la médiation et l’arbitrage sont souvent présentées comme de simples options « moins chères ». C’est une vision réductrice. La réalité est plus profonde : il s’agit d’un changement complet de paradigme. Il faut cesser de penser en guerrier pour commencer à penser en gestionnaire de risque, en investisseur. La vraie victoire n’est pas celle que prononce un juge après des années de procédure, mais celle qui permet à votre entreprise de continuer à tourner, à innover et à prospérer avec un minimum de perturbations.
Cet article n’est pas un cours de droit. C’est un guide stratégique pour entrepreneurs. Nous allons déconstruire le véritable coût d’un conflit, vous apprendre à négocier sur vos intérêts plutôt que sur vos positions, et explorer les différentes arènes (médiation, arbitrage, petites créances) non pas comme des champs de bataille, mais comme des outils à votre disposition. L’objectif : vous donner les clés pour prendre la décision la plus rentable pour votre entreprise.
Pour vous aider à naviguer entre ces différentes options, cet article est structuré pour vous guider pas à pas. Vous découvrirez le calcul que vous devez absolument faire, les stratégies de négociation à adopter et les mécanismes concrets pour résoudre votre différend, ou même pour récupérer votre dû après un jugement.
Sommaire : Résoudre un litige commercial au Canada : une approche entrepreneuriale
- Frais d’avocats et temps perdu : le calcul réel que votre avocat ne vous montre pas
- Position vs Intérêt : comment préparer vos arguments pour négocier, pas pour gagner ?
- Clause d’arbitrage : est-ce vraiment plus rapide et confidentiel que la cour ?
- Cour des petites créances : comment récupérer vos 15 000 $ sans avocat ?
- Gagner n’est pas payer : comment saisir les actifs du débiteur s’il refuse de payer ?
- Registre des plaintes : pourquoi un fichier Excel ne suffit plus pour satisfaire le régulateur ?
- Mauvaise foi : l’erreur dans la lettre de fin d’emploi qui peut doubler la facture
- Licenciement sans cause : ce que la jurisprudence récente change pour les employeurs canadiens
Frais d’avocats et temps perdu : le calcul réel que votre avocat ne vous montre pas
Le premier chiffre que votre avocat vous donne est celui de ses honoraires. C’est la partie visible de l’iceberg. Le véritable coût d’un procès, ce que j’appelle le Coût Total de Possession du conflit, est bien plus élevé. Pensez-y comme un entrepreneur : chaque heure que vous passez à compiler des documents, à répondre à des courriels, à préparer des témoignages, est une heure que vous ne passez pas à développer votre entreprise, à chercher de nouveaux clients ou à innover. Ce coût d’opportunité est rarement, voire jamais, chiffré. Et il est colossal. Un procès n’est pas un événement ponctuel, c’est une occupation à temps partiel qui s’étale sur des mois, voire des années.
Les données sont sans appel. Envisager un procès civil traditionnel peut représenter un investissement financier considérable, alors qu’une journée de médiation est souvent une solution bien plus maîtrisée. Selon des chiffres de l’industrie, le coût moyen d’un procès civil peut atteindre des sommets, alors qu’une médiation se chiffre différemment. Par exemple, une plateforme comme Justicity au Canada cite un coût moyen de 31 330 $ pour un procès civil, contre environ 1 200 $ pour une journée de médiation. Cette différence n’est que la pointe de l’iceberg financier. Le temps, c’est de l’argent, et les délais judiciaires sont une véritable hémorragie pour une PME.
Ce tableau, basé sur des données récentes, illustre de manière frappante le gouffre temporel entre les différentes approches. Attendre deux ans pour une décision aux petites créances est une éternité dans la vie d’une entreprise.
| Type de procédure | Délai moyen | Source |
|---|---|---|
| Tribunal (petites créances) | 24 mois (753 jours) | Données 2024 – La Presse |
| Médiation obligatoire | 4-6 mois | Districts Longueuil et Laval |
| Médiation privée | Maximum 1 mois | Justicity |
Face à ces chiffres, la question n’est plus de savoir si vous pouvez « gagner » dans deux ans, mais si votre entreprise peut se permettre de mettre sa trésorerie, son énergie et son attention en pause pendant toute cette durée. Un « mauvais » arrangement obtenu en un mois, qui vous permet de récupérer 70% de votre créance et de tourner la page, est presque toujours plus rentable qu’une « bonne » victoire obtenue dans deux ans, après avoir dépensé des dizaines de milliers de dollars en frais et en temps.
Position vs Intérêt : comment préparer vos arguments pour négocier, pas pour gagner ?
En salle de médiation, l’erreur la plus fréquente que je vois chez les entrepreneurs est de confondre leur position et leur intérêt. La position, c’est ce que vous déclarez vouloir : « Je veux le paiement intégral de ma facture de 50 000 $ maintenant ! ». C’est une déclaration de guerre, une ligne rouge dans le sable. L’intérêt, c’est le besoin fondamental qui se cache derrière cette demande : « J’ai besoin de liquidités rapidement pour financer ma prochaine commande de matières premières et ne pas perdre un gros client ». Comprendre cette distinction est la clé d’une négociation réussie.
Se battre pour une position mène à une impasse. Si votre position est « 50 000 $ » et celle de votre débiteur est « 0 $ », il n’y a pas de terrain d’entente. Vous êtes dans un jeu à somme nulle où l’un doit perdre pour que l’autre gagne. En revanche, si vous vous concentrez sur les intérêts, un monde de solutions créatives s’ouvre. Peut-être que votre débiteur ne peut pas payer 50 000 $ aujourd’hui, mais il pourrait vous payer 25 000 $ immédiatement et vous offrir des services d’une valeur de 30 000 $ sur les six prochains mois, ce qui résoudrait votre besoin de liquidités ET vous apporterait une valeur supplémentaire. C’est ça, penser en entrepreneur. Un accord de médiation, une fois signé, a la même force contraignante qu’un contrat, sécurisant ainsi la solution trouvée.
Étude de cas : L’approche du cabinet Ménard Martin
Au Québec, le cabinet d’avocats Ménard Martin illustre parfaitement cette approche. Pour leurs clients commerciaux, ils privilégient systématiquement la médiation. Leur stratégie consiste à orienter immédiatement le dossier vers un médiateur compétent qui s’assure que le processus ne s’éternise pas. En se concentrant sur les intérêts des deux parties, ils parviennent à des règlements rapides qui non seulement résolvent le conflit, mais préservent souvent des relations d’affaires précieuses pour l’avenir, une issue presque impossible à obtenir devant un tribunal.
Préparer une médiation ne consiste pas à bâtir un dossier pour « démolir » l’autre partie. Il s’agit d’une introspection stratégique pour identifier vos propres intérêts et anticiper ceux de votre interlocuteur. La victoire n’est plus d’avoir raison, mais de repartir avec une solution qui sert les objectifs de votre entreprise. Cette préparation est cruciale et suit une méthode structurée.
Votre plan d’action pour préparer la médiation
- Prise de contact : Établissez une communication initiale pour identifier clairement les positions de chacun, mais surtout pour commencer à sonder les intérêts cachés.
- Collecte de données : Rassemblez tous les faits, chiffres et documents, mais aussi les informations sur le contexte et les personnalités impliquées.
- Plan de négociation : Définissez plusieurs scénarios d’accord possibles qui répondraient à vos intérêts fondamentaux, au-delà de votre position initiale.
- Instauration de la confiance : Adoptez une posture d’écoute et de collaboration. Montrez que vous cherchez une solution, pas un coupable.
- Anticipation des points durs : Identifiez les problèmes de fond les plus difficiles et préparez des arguments constructifs pour les aborder sans agressivité.
Clause d’arbitrage : est-ce vraiment plus rapide et confidentiel que la cour ?
Si la médiation est une négociation facilitée, l’arbitrage peut être vu comme un tribunal privé. C’est une autre voie puissante pour éviter les lourdeurs du système judiciaire public. Contrairement au médiateur, qui aide les parties à trouver leur propre solution, l’arbitre écoute les arguments des deux camps et rend une décision finale et contraignante (la « sentence arbitrale »), qui a la même valeur qu’un jugement de cour. L’un des avantages fondamentaux est le choix de l’arbitre : vous pouvez sélectionner un expert de votre secteur d’activité, qui comprendra immédiatement les nuances techniques de votre litige, contrairement à un juge généraliste.
La question de la rapidité est centrale. Un arbitrage peut être organisé en quelques semaines ou mois, selon la complexité du dossier, un délai sans commune mesure avec les années d’attente possibles au tribunal. Cette rapidité préserve votre trésorerie et votre énergie mentale. De plus, la confidentialité est totale. Tout ce qui est dit, montré ou décidé en arbitrage reste entre les parties. Votre litige ne se retrouvera pas dans les archives publiques, protégeant ainsi votre réputation et vos secrets d’affaires. C’est une considération majeure pour tout entrepreneur soucieux de son image de marque.

Cette approche structurée et privée est particulièrement adaptée aux litiges techniques ou internationaux, où la confidentialité et l’expertise de l’arbitre sont primordiales. Comme le résume bien une plateforme spécialisée dans le domaine, l’arbitrage est conçu pour l’efficacité entrepreneuriale.
L’arbitrage remplace avantageusement un procès. Il est parfaitement adapté aux entreprises souhaitant trancher un litige rapidement, de manière confidentielle avec un budget maîtrisé. C’est une solution particulièrement adaptée aux litiges commerciaux et/ou internationaux.
– Plateforme Justicity, Description des services d’arbitrage commercial
Il est important de noter que si une médiation échoue, les parties peuvent toujours décider d’aller en arbitrage ou devant les tribunaux. L’un n’exclut pas l’autre. La meilleure stratégie est souvent préventive : inclure une « clause d’arbitrage » dans vos contrats commerciaux. Cette clause stipule qu’en cas de litige, les parties s’engagent à recourir à l’arbitrage plutôt qu’aux tribunaux. C’est une assurance-conflit peu coûteuse qui peut vous sauver d’un bourbier judiciaire des années plus tard.
Cour des petites créances : comment récupérer vos 15 000 $ sans avocat ?
Pour les litiges de plus faible montant, la Cour des petites créances semble être une option accessible et moins intimidante. Conçue pour que les citoyens et les petites entreprises puissent se représenter eux-mêmes sans avocat, elle offre une procédure simplifiée. Cependant, « simplifié » ne veut pas dire « instantané ». Comme nous l’avons vu, les délais peuvent y être extrêmement longs. Et même dans cette enceinte, la philosophie de la résolution à l’amiable prévaut de plus en plus.
Au Québec, par exemple, la médiation est obligatoire et gratuite pour la plupart des dossiers aux petites créances. Et les résultats sont probants : selon les données du ministère de la Justice, environ 60% des dossiers sont réglés en médiation, évitant ainsi aux parties d’attendre un procès. Cela démontre que même lorsque la voie judiciaire est entamée, le système lui-même reconnaît l’efficacité d’une solution négociée. Refuser de participer sérieusement à la médiation est souvent mal perçu par le juge si le dossier finit par aller à l’audience.
Il est crucial de connaître les limites financières de cette cour, car elles varient considérablement d’une province à l’autre au Canada. Un litige de 20 000 $ qui relève des petites créances en Ontario devra passer par la cour ordinaire au Québec. Cette information est essentielle pour déterminer la bonne stratégie dès le départ.
| Province/Territoire | Limite maximale | Année de mise à jour |
|---|---|---|
| Québec | 15 000 $ | 2024 |
| Ontario | 35 000 $ | 2020 |
| Alberta | 50 000 $ | 2021 |
| Colombie-Britannique | 35 000 $ | 2023 |
Même si vous pouvez vous représenter seul, le processus exige de la rigueur : remplir correctement les formulaires, notifier l’autre partie selon les règles, et présenter vos preuves de manière claire et concise. L’avantage principal est l’économie sur les frais d’avocat. L’inconvénient est le temps que vous devrez y consacrer personnellement, et surtout, le délai avant d’obtenir une audience et un jugement. Encore une fois, la question de la rentabilité se pose : est-il plus rentable d’accepter un règlement de 10 000 $ aujourd’hui en médiation, ou d’attendre deux ans pour peut-être obtenir 15 000 $ ?
Gagner n’est pas payer : comment saisir les actifs du débiteur s’il refuse de payer ?
C’est la douche froide que beaucoup d’entrepreneurs découvrent trop tard. Vous avez « gagné » votre procès. Le juge vous a accordé la totalité de la somme demandée. Vous célébrez, pensant que le cauchemar est terminé. Mais quelques semaines plus tard, l’argent n’est toujours pas dans votre compte. C’est là que vous réalisez une vérité brutale : obtenir un jugement et être payé sont deux choses complètement différentes. Le jugement n’est qu’un papier officiel ; il ne force pas magiquement l’argent à sortir du compte en banque de votre débiteur.
Si le débiteur refuse ou « oublie » de payer, un second marathon commence : la procédure d’exécution. Vous devez retourner au tribunal pour obtenir un « bref de saisie », puis mandater un huissier de justice (au Québec) ou un shérif (dans les autres provinces) pour exécuter ce bref. Cela implique des frais supplémentaires et des délais. L’huissier peut alors tenter de saisir une partie du salaire du débiteur, de l’argent dans ses comptes bancaires ou même ses biens (voiture, équipement). Chaque étape est régie par des règles strictes et peut être contestée par le débiteur, ajoutant encore des délais et des coûts.
Cette phase d’exécution est souvent plus complexe et frustrante que le procès lui-même. Vous pouvez vous retrouver à dépenser encore plus d’argent pour essayer de récupérer une somme qu’on vous a déjà accordée, avec un succès incertain si le débiteur est insolvable ou bien organisé pour cacher ses actifs. C’est l’illustration parfaite du principe qu’un « mauvais arrangement » (un paiement partiel mais immédiat et volontaire) vaut souvent mieux qu’un « bon procès » (un jugement complet mais difficile, voire impossible, à exécuter).
Alternative à la saisie : Le dépôt volontaire au Québec
Même après un jugement, des mécanismes moins conflictuels existent. Au Québec, le dépôt volontaire permet à un débiteur d’éviter la saisie humiliante de son salaire ou de ses biens. Il s’engage à déposer lui-même une partie de ses revenus au greffe du tribunal, qui se charge ensuite de répartir les sommes entre ses créanciers. D’après les informations fournies par Éducaloi, le débiteur doit verser au minimum le montant qui serait légalement saisi sur son salaire. Cette approche protège sa dignité tout en garantissant un paiement progressif, évitant les frais et complications d’une saisie forcée pour le créancier.
La perspective de devoir engager des procédures de saisie devrait être un facteur majeur dans votre décision initiale. Avant de vous lancer dans une bataille juridique, posez-vous la question : « Si je gagne, quelle est la probabilité réelle que je puisse récupérer mon argent facilement ? ». Si la réponse n’est pas « très élevée », la médiation devient une option encore plus séduisante.
Registre des plaintes : pourquoi un fichier Excel ne suffit plus pour satisfaire le régulateur ?
Passer du mode réactif au mode proactif est la marque d’une gestion d’entreprise mature. Traiter les litiges au cas par cas, c’est comme éteindre des feux en permanence. Mettre en place un système structuré de gestion des plaintes, c’est installer des détecteurs de fumée et des extincteurs. Un simple fichier Excel où l’on note les réclamations des clients est une première étape, mais elle est largement insuffisante. Pourquoi ? Parce qu’elle ne permet pas d’analyser les tendances, d’identifier les causes profondes des problèmes et de mettre en place des actions correctives pour éviter que les mêmes conflits ne se répètent.
Un véritable registre des plaintes, souvent exigé par les régulateurs dans de nombreux secteurs, doit être un outil de pilotage. Il doit vous permettre de voir si un problème particulier avec un produit ou un service revient constamment. C’est une mine d’or d’informations pour améliorer votre offre et, par conséquent, réduire les sources de litiges futurs. C’est une forme de médiation continue et interne. En traitant une plainte rapidement et équitablement via un processus clair, vous désamorcez 90% des conflits avant qu’ils ne nécessitent l’intervention d’un avocat ou d’un médiateur.
L’investissement dans un système de gestion des plaintes (même un logiciel simple) est infiniment plus rentable que le coût d’un seul litige qui dérape. Les données sur les délais de résolution le prouvent : un conflit qui entre dans le système judiciaire ou même en médiation formelle se compte en mois. Selon des données de 2024 rapportées par Protégez-Vous, la médiation aux petites créances permet de régler un litige en 3 à 9 mois, ce qui est déjà excellent comparé aux 29 mois en moyenne pour obtenir un jugement à Montréal. Mais une plainte bien gérée en interne peut être résolue en quelques jours.
Penser qu’un fichier Excel suffit, c’est ignorer la valeur stratégique de la gestion des conflits. C’est voir la plainte comme un problème à gérer, et non comme une opportunité d’amélioration. Pour satisfaire un régulateur, mais surtout pour la santé de votre entreprise, il faut un processus documenté, transparent et orienté vers la recherche de solutions. C’est le meilleur investissement que vous puissiez faire pour éviter les coûts, le temps et le stress décrits dans les sections précédentes.
Mauvaise foi : l’erreur dans la lettre de fin d’emploi qui peut doubler la facture
Bien que le titre mentionne la fin d’emploi, le concept de « mauvaise foi » est une mine légale qui peut exploser dans n’importe quel type de litige commercial. Agir de mauvaise foi, c’est adopter un comportement déloyal, trompeur ou malveillant dans le cadre de vos relations d’affaires ou de la résolution d’un conflit. Et les tribunaux canadiens n’apprécient pas du tout. Une accusation de mauvaise foi prouvée peut entraîner l’octroi de dommages-intérêts punitifs importants, qui viennent s’ajouter à la somme initiale du litige. Autrement dit, cela peut facilement doubler votre facture.
Qu’est-ce qui constitue la mauvaise foi dans un contexte commercial ? Cela peut être le fait de refuser catégoriquement et sans raison valable toute tentative de discussion ou de médiation. Cela peut être de retenir des informations cruciales de manière délibérée pour nuire à l’autre partie, ou de faire des promesses que vous n’avez aucune intention de tenir. C’est, en somme, l’antithèse de l’approche entrepreneuriale que nous défendons : au lieu de chercher une solution rentable, vous cherchez à nuire, et ce comportement a un coût.
La meilleure façon d’éviter de telles accusations est d’adopter et de documenter une attitude de bonne foi tout au long du processus. Proposez systématiquement une médiation par écrit. Répondez aux communications de l’autre partie de manière professionnelle, même si vous êtes en désaccord. Montrez-vous ouvert à des compromis raisonnables. Cette posture a un double avantage : premièrement, elle augmente réellement vos chances de trouver un accord à l’amiable. Deuxièmement, si le litige devait tout de même se retrouver devant un juge, vous pourrez présenter une preuve documentée de votre comportement raisonnable, ce qui vous protégera contre d’éventuelles allégations de mauvaise foi.
La volonté de préserver des conditions d’affaires durables reste un préalable dans une médiation. Le médiateur s’assure en premier lieu du souhait du demandeur de maintenir des relations avec l’autre partie.
– Médiateur des entreprises, Ministère de l’Économie français – Guide de la médiation
Cette citation, bien que provenant du contexte français, capture une vérité universelle en médiation : l’intention de collaborer est fondamentale. Agir de mauvaise foi, c’est détruire cette intention et s’exposer à des conséquences financières bien plus graves que le litige initial. C’est un pari que_aucun entrepreneur avisé ne devrait prendre.
À retenir
- Le coût d’un procès dépasse largement les frais d’avocat ; il inclut votre temps, votre stress et les opportunités manquées (le « Coût Total de Possession du conflit »).
- La clé d’une négociation réussie est de se focaliser sur vos besoins réels (intérêts) plutôt que sur vos demandes initiales (positions).
- Même après avoir gagné un procès, l’exécution du jugement pour récupérer l’argent est une procédure longue, coûteuse et incertaine.
Licenciement sans cause : ce que la jurisprudence récente change pour les employeurs canadiens
Le titre de cette section évoque le droit du travail, mais la leçon sous-jacente est universelle et constitue la conclusion parfaite de notre réflexion stratégique. La manière dont une entreprise gère ses conflits, qu’il s’agisse d’une rupture de contrat avec un fournisseur ou d’un licenciement, est le reflet de sa culture. La jurisprudence récente, au Canada, tend de plus en plus à sanctionner les employeurs qui gèrent les fins de contrat de manière brutale ou déloyale. Le message est clair : la manière de faire les choses compte autant que le fond du droit.
Transposons cela à vos litiges commerciaux. Vous pouvez avoir le « droit » de votre côté, mais si vous menez le combat de manière agressive, si vous cherchez à humilier votre adversaire, vous créez un ressentiment qui rendra toute solution négociée impossible. Vous vous forcez vous-même à emprunter la voie la plus longue, la plus coûteuse et la plus risquée : celle du tribunal. Adopter une approche collaborative n’est pas un signe de faiblesse, c’est un signe d’intelligence stratégique.
L’approche collaborative de l’IMAQ pour les PME
L’Institut de médiation et d’arbitrage du Québec (IMAQ) promeut activement cette vision auprès des PME. Avec un réseau de plus de 500 médiateurs accrédités, ils ne proposent pas seulement un service, mais une philosophie. Leur trousse pour PME vise à outiller les gestionnaires pour qu’ils adoptent une posture de « leadership bienveillant » face aux tensions. L’idée est de transformer les conflits en opportunités de négociation constructive, ce qui permet non seulement de résoudre le problème présent, mais aussi de préserver les relations et la réputation au sein de l’écosystème entrepreneurial québécois.
En fin de compte, la décision de choisir entre la médiation, l’arbitrage ou le tribunal ne devrait pas être une réaction émotionnelle. Ce doit être une décision d’affaires froide et calculée, basée sur une analyse de rentabilité. Quel chemin vous offre la solution la plus rapide, la plus économique et la plus durable ? Dans la très grande majorité des litiges de moins de 100 000 $, la réponse n’est pas dans une salle d’audience. Elle est autour d’une table de négociation, où des entrepreneurs pragmatiques trouvent un terrain d’entente pour pouvoir retourner à ce qui compte vraiment : faire des affaires.
Intégrer cette approche de résolution de conflits dans votre ADN d’entrepreneur n’est pas seulement une façon d’économiser de l’argent ; c’est une compétence de gestion qui renforcera la résilience et la pérennité de votre entreprise. Évaluez dès maintenant la solution la plus adaptée à vos besoins spécifiques et transformez vos conflits en opportunités.
Questions fréquentes sur la médiation commerciale au Canada
Qui peut bénéficier de la médiation des entreprises?
Absolument tous les acteurs économiques peuvent y recourir. Cela inclut les très petites entreprises (TPE), les PME, les grands groupes, mais aussi les artisans, les entrepreneurs individuels et même les administrations ou les organismes publics, quel que soit leur secteur d’activité au Canada.
Quel est le montant minimum pour une médiation commerciale?
Il n’y a généralement pas de montant minimum formel au Canada, surtout avec des médiateurs privés. Cependant, à titre indicatif, des services comme celui du Médiateur des entreprises en France traitent des demandes pour des montants supérieurs à environ 2 200 $ canadiens. La médiation est pertinente dès que les coûts potentiels d’un conflit (en temps et en argent) dépassent la valeur d’une journée de facilitation.
La médiation est-elle vraiment confidentielle?
Oui, la confidentialité est l’un des piliers de la médiation. Tout ce qui est dit, échangé ou écrit pendant le processus est strictement confidentiel et ne peut être utilisé ultérieurement devant un tribunal. Toutes les parties, y compris le médiateur, signent un accord de confidentialité avant de commencer, garantissant un espace de discussion sécuritaire et transparent.